Maintenant plus d'excuses pour le coup classique du "Ouais mais bon, tu vois quoi, tu comprends, c que..." et ne pas prendre de news. L'ère du Blog sonne le glas de la désinformation institutionnelle (celle des chinois du FBI): maintenant où que tu te trouves sur la planète tu peux savoir ce dont il retourne: Les trépidantes journées de McJanus te sont contées avec fifres z'et tambourins! ;-)

lundi, janvier 09, 2006

Vietnam: la diplomatie du sport?

Le syndrôme de la balle blanche de Pékin, ou comment, assistant à un entraînement de Karaté, j'ai personnellement eu l'occasion de me frotter à la diplomatie du sport. Diplomatie, vraiment? Survie plutôt. Récit réel, empreint de respect.

Cette politique de rapprochement commence au nord du Vietnam, à Lang Son précisément. Là-bas la rencontre par hasard deux charmantes entraîneuses de Karaté Suzucho m'oriente vers un Dojo (=salle d'entraînement) à 600 km de là, au centre du pays.

Deux semaines plus tard, arrivé en ville de Hué par le bus, je cherche et trouve le fameux club. Le Senseï est un vieux monsieur en kimono beige, très calme, redoublant d'efforts pour me parler en français. Un authentique sage. Mais un authentique combattant aussi: ceinture noire 7ème dan, un maître reconnu dans sa discipline dont le club, Suzucho Karate Do Ryu, est champion du Vietnam en Kumité (=combat). J'ai beau être motivé cela reste tout de même un joli pari pour l'occidental qui s'apprête à suivre un entraînement.

Alors que je m'échauffe et transpire mes premières gouttes, les premiers jeunes arrivent. Je me demande à quelle sauce je serai mangé. Mais Mr.-le-Senseï me convoque et l'on parlemente encore un peu en attendant le début des négociations à 19h. Il me prête également un kimono digne de ce nom: je porte ses couleurs.

Puis cela commence...On court, on saute, on fait des sautés-retournés-vrillés-carpés avec des Kiaï (=cris) de Kamikaze. Dès cet instant, à leurs yeux, je représente l'ensemble du Karaté Shotokan Suisse... Et si je me rate, outre le déshonneur c'est moi qui serait frit-pendu-bouilli-rôti puis servi avec du riz blanc au festin du lendemain matin.
Il convient de préciser qu'il n'y a dans la salle QUE des ceintures noires. En rangées de 5, en colonnes de 7 cela fait 40 combattants qui se réjouissent de me démonter pour me prouver la supériorité indiscutable du Karaté Vietnamien.

"Seul contre tous" je ruisselle comme une loutre, et visiblement je suis le seul dans ce cas. Pas de ventilateur à la rescousse. Je trouve un peu de réconfort auprès de la manche du kimono qu'ils m'ont gentiment prêté.

Vient le moment des démonstrations, les katas. On monte une petite surface avec des tapis. Une fille vient faire une démonstration. Epoustouflante. Le Senseï, depuis la chaise où il observe, me désigne: "Jan, pouvez-vous nous faire un kata?". Je m'extrait avec peine de ma flaque de sueur, m'avance sur le tatami puis salue comme il se doit. Respect du protocole.

Et là... c'est la petite échelle de force matérialisée par la représentation de "Heian Shodan" (1er Kata). Ils s'attendaient à mieux c'est clair. Mais après 3 mois d'inactivité dans le domaine du karaté il s'agissait de miser sur une valeur sûre.

Comme pour me rabâcher leur perfection technique extrême, commence ensuite l'explication gestuelle d'un kata sur-complexe qui dure bien 7 minutes. Pas un doute ni une hésitation, mais des projections dans tous les sens et une maîtrise de l'espace à faire pâlir Youri Gagarine (Neil Armstrong et Bruce Lee n'en parlons pas!)

Kumité! La partie virile des négociations commence: je l'attendais avec une certaine appréhension. Le Senseï désigne deux garçons qui vont s'équiper de casques, gants et protège-descendance. Puis c'est parti pour 3 minutes d'échange réciproque d'hostilités. Lorsque c'est fini, les yeux se tournent vers moi?

Alors je me lève, vais boire une gorgée d'eau (pour ne pas mourir prématurément déshydraté), puis vais m'équiper. Mon adversaire ne semble pas avoir été croisé avec un conseiller militaire soviétique: une chance!
Mais à peine le combat commencé je me rends compte combien il maîtrise vraiment! Une agilité de tigre! Il me transperce du regard. Stratégiquement, je clairvoit déjà la situation à venir et en conclut qu'il n'y "a pas intérêt à ramasser trop de coups sous peine de retour prématuré sur sol helvète pour cause de quintuple fracture des 220 os de mon corps". Le combat s'engage: quand il passe à l'offensive, il appuie son action.

Je bloque un de ses coups de pieds et je me tue le Tibia: pas grave, je vis encore. Je lui lance un Ura-Mawashi histoire de lui montrer qu'il y a quand même du répondant dans la hanche d'en face. Il me sort un coup de pied sournois et je bénis l'inventeur de la coquille de protection. Puis soudain la percée: il me met un coup de poing que je me charge de prendre en plein dans les côtes droites... RâââÂÂâââh petit ^*%#^#@ de (&^% à la %#^$ !

Act the fool. Je fais comme si de rien n'était (mais croyez-moi je déguste sévère!), je retourne dans mon coin. Deux bouffées d'air (particulièrement humide à l'intérieur de mon casque): j'aimerai que ce moment dure plus mais déjà c'est reparti. Il me guette au tournant et il ne s'agit vraiment pas de faire le douillet. Du coup je change un peu de stratégie: je l'attends puis le prend en embuscade avec quelques directs bien sentis! Ca aussi ça va lui apprendre la prudence. Non mais oh!

On bouge encore, on s'évalue. Encore quelques coups pour l'honneur, mais globalement nous sommes tous les deux entrés dans une politique de containment. Enfin le gong résonne, c'est la fin des hostilités! J'ai le droit à un salut debout du Senseï. Très honoré, je suis surtout heureux d'avoir sauvé ma Vie et la suite du McJanus El Loco Tour 2005...!

Un art martial japonais, un Senseï et des disciples vietnamiens, un visiteur suisse? N'est-ce pas là une certaine forme de mondialisation par le sport? Un échange rendu possible par la pratique commune d'une certaine forme de violence? Finalement, dans ce cas précis, c'est la violence au service de l'échange fraternel et du respect mutuel. Une issue est possible: allez donc faire un tour chez nos Amis vietnamiens?

1 Comments:

Anonymous Anonyme said...

C'est un de mes "morceaux" préférés de ton voyage! cool: la globalisation positive! a-c

3:59 PM

 

Enregistrer un commentaire

<< Home