D'ici deux heures et demie, je devrai recevoir ma "dose" et commencer à "me détendre". Avec cette piqure dans la fesse, nul ne résiste au paradis artificiel des petites femmes en blanc. Après cela je resterai encore quelques instants à savourer l'effet, chill-out en chambre, avant d'être roulé jusqu'au sous-sol, puis glissé par le passe-plat.

D'ici trois heures, je serai sur le grand-lit-vert, entouré de parfaits inconnus, tous affairés à une seule chose: retirer le diverticule creux appendu à la surface médiane du cæcum, 3 cm au-dessous de l’abouchement iléal qui occupe encore mon abdomen.

D'ici quatre heures et demie, je serai normalement ressorti... en plein en train de planer, je devrai gentiment me réveiller dans une salle, couché, entouré de personnel en blanc. A une courte porte de là, je n'aurai aucune peine à m'imaginer Tchim en train d'attendre ;)

...

Alors voila, reste plus qu'à y aller, sans crainte ni appréhension.

Quand j'en reparlerai, ce sera de quelques grammes plus léger... et un souci en moins ;)


13h05:
Un gobelet pour la pillule, un micro-gobelet pour l'eau... Cul-sec!

13h18:
So zexy avec mon 'tit bonnet, mon caleçon en filet, ma robe de chambre ouverte sur l'arrière et mes "bottes" sous forme de chaussettes en tissu ;)

Bon c'est pas tout ca, mais il va finir par faire de l'effet leur dormicorm?! Je plane pas là!

Wait (a bit more) and see...

Heure H:
On me passe comme prévu dans le passe plat. "Tournez vous sur la gauche." BzzzZzzz- Tut - Bzzzz et me voila de l'autre côté entouré de gens qui portent de petits z'hommes verts et des masques sur le visage. On devise nonchalamment quelques z'instants encore... je me rappelle de tout et je suis parfaitement conscient. On me sangle les pieds (!) et on me passe plein d'entraves sur les amins.

On me passe dans le bloc, une grande salle octogonale (ou heagonale, j'avoue ne plus bien savoir ;) au plafond de laquelle il y a une lampe chirurgicale immense, de 3x3 blocs lumineux... Un nouveau monsieur vient au-dessus de moi. C'est l'anest' ;) Il se présente, me dit qu'il est désolé de ne pas m'avoir rencontré hier (=la faute à un bloc qui s'éternise) mais qu'on a déjà fait connaissance pas le biais du questionnaire. Je réitère quelques informations bateau sur mon mode de vie... il les sait déjà et ca ne l'inquiète pas plus que tant. Puis il me préviens: je vais vous mettre le "truc-dans-la-main" (à ne pas confondre avec le poil habituel;) ... Là, évidemment, je rigole comme un dingue, comme à chaque fois que j'ai une interaction médicale stressante (passk oui ca m'stresse un peu!). Honeur suprême, j'ai droit à son étonnement: "C'est bien la première fois que je vois quelqu'un rire autant en allant au bloc!"... oui m'enfin, chuis p'têt un peu nerveux quand même ;)

Dans la salle, de plus en plus de monde arrive. Je salue à la cantonnade les premiers... mais je peine à les distinguer puisque je n'ai pas mes lunettes... et ils ont sans doute mieux à faire que de me répondre, ca c'est sûr ;)

Puis l'anest' raconte un charabia incompréhensible à sa sbire: elle me met un masque sur le visage. Je demande si c'est ca qui va m'endormir. "Non non, ca c'est juste de l'oxygène". Je demande alors par quel moyen ils vont réussir à me faire dormir (et c'est pas impossible que j'aie précisé que pour le coup je suis un dur à cuire à qui le dormicorm en pillule ne fait pas d'effet)... Il se passe quelques secondes puis... "C'est par le goutte-à-goutte qu'on va vous endormir... et bonne nuit!" ...Rideau!

J'ai été maté comme de rien. Il n'a pas fallu plus de 5 secondes au grand maximum. Sans doute de manière presomptueuse, mais j'aurai pensé résister plus longtemps... on va dire que j'étais déjà bien fatigué à l'origine, ca me fera une excuse.

Le réveil par contre c'était d'un style différent. Dans la salle à cet effet j'ai soudain eu le cerveau qui s'est remis en marche: d'un coup! Puis c'est mon corps qui a gentiment (très gentiment) suivi, se faisant plus présent au niveau de l'abdomen... on sent que c'est pas là que se passe la nouveauté anatomique ;)

Quasiment dès le réveil, par je ne sais quel magie médicale, le médecin sait et il arrive. "Monsieur D., tout s'est bien passé, et j'ai déjà prévenu votre mère". Ouf! Sinon j'aurai encore pu me faire chamailler ;)

Dès que je réunis suffisamment de force pour réussir à articuler trois mots, je demande à une infirmière l'heure... en tête j'ai ce désir de dresser le timing de ma journée ;) "Il est quinze heures quarante cinq". Je me répète, je crains d'oublier. Mais alors je me mnémotechnicise la chose: 3heures 45, soit 3-4-5. Je me dis alors "...et en plus le cerveau a suivi ;)"

Là c'est le moment ou je passe pour un fou: juste avant de descendre au bloc, j'ai recu le SMS d'un ami qui travaille dans une grosse boite de pub, manifestant son intérêt pour tourner un film en 360°. Vu que c'est quelqu'un que j'apprecie réellement beaucoup, j'ai appellé directement et c'était donc l'un de mes derniers sujets de réfléxion avant le bloc... aussi, dès l'instant qui a suivi l'épisode du 3-4-5 j'ai immédiatement pensé, texto: "Saatchi ;)" ...puis je suis retombé encore quelques instants.

Pas que je morfle, mais pas non plus que j'apprécie follement l'instant... Je reste comme cela, entre deux eaux et entre deux maux pendant encore une heure environ.

Quand j'ai été ramené à l'étage, Tchim m'attendait à la sortie de l'ascenseur! Waow! J'étais attendu comme une vedette, sans pourtant la dégaine qui sied à ce statut. On choisit pas toujours... M'enfin, à mwa ca faisait plaisir et à elle sans doute aussi, c'est l'essentiel. On reste ensemble un moment, mais je ne suis pas de la plus distrayante des compagnies... en plus c'est assez coton pour mwa de parler, alors Tchim s'en va "après un temps indeterminé".

Peu après mon retour, le voisin de chambre à quitté les lieux, je me suis donc retrouvé en solo. J'ai été un peu mal quelques instants: mal au ventre côté coupé et un peu envie de gerber aussi. Je le dis sans autre... pusi je m'excuse pour mon franc parler ;) En plus j'imagine si je devais concrétiser ca... ca serait assurément super épique!

Heureusement, ici on est shooté à l'oeil, alors après m'avoir demandé sur quelle niveau je me situe dans une échelle de 1 à 10 , on me fait passer une seringue d'anti-gerbif et une autre de tranquilisant... ca y'eeeeest... lààààà je redeviens tout cool... j'en profite pour me tourner sur le côté et pour dormiroter un brin :)

A côté j'entend le téléphone qui sonne: je réponds une fois et c'est Amandine (? à vérifier), puis une autre fois et c'est Marek (je crois) ... bref je fais des conversations de drogué sur un lit d'hosto à moitié en train de dormir... alors faudra excuser ma mémoire ;)

Enfin, je reviens gentiment à la Vie lorsque l'anest' vient me faire la visite de courtoisie post-op en chambre. Il est plutôt sympa ce "type" qui vient me voir... puis soudain je réalise: "AAaah mais c'est vous?! Je vous avais pas reconnu sans le masque et le bonnet". Il voit que je vit toujours, et visiblement c'est tout ce qui importe pour lui ;)

Après ca j'ai gentiment repris le rythme. J'ai allumé la lumière, regardé à travers la fenêtre... et encore... puis à nouveau... puis j'ai essayé de tenter à commencer la lecture du journal... Oui je sais c'est passionnant.. mais bon, c'est MON histoire alors je la raconte comme je veux!

Puis est venue l'heure du "repas" qu'on m'a proposé si "Monsieur D. vous n'avez plus envie de gerber?" (je cite, elle-même me citant ;) J'ai opiné du chef et on m'a alors apporté... un potage!

Gasp non seulement je n'avais plus envie de gerber mais en plus j'ai carrément la méga-dalle! C'est que j'ai absolument rien mangé depuis hier soir moi... et encore, c'était plutôt frugal!

Donc je slurp mon potage en deux temps trois mouvements... jusqu'à la dernière lappe... puis je me demande, d'abord à moi-même, puis à l'infirmière, si un rab' n'est pas envisageable... et que sinon j'ai aucun problème à manger des biscottes (avec, Ô luxe, un peu de beurre si possible) et/ou un yoghurt... bref n'importe kwa mais siouplaiiiit!

On m'apporte triomphalement deux biscottes cellophanées. Un pur délice! C'est fou comme on peu apprécier les choses simples dans certains occasions bien particulières de la Vie ;) Donc je m'envoie ma première biscotte comme un affamé... mais la seconde, par contre c'est une autre affaire... je la savouuuure mini-morse par mini-morse... A tel point que voila maintenant près de trois heures que je la fais durer: authentique!

Je suis résolu: quand je sortirai j'irai acheter dix paquets de ces biscottes et je me les envoie les unes après les autres! ...avec plein de beurre et de la confiture! Gniek gniek gniek, j'me vengerai ;)

Pas longtemps après ce "festin", Tchim est revenue auprès de moi. Entre-temps j'ai eu Marek au téléphone aussi... en live depuis de cube transformé en véritable centre opérationnel pour GV Corporation Worldwide... Suis content de l'avoir eu au fil, ca fait plaisir quand même faut bien dire ;)

J'ai encore chillé un moment, discuté avec Tchim tenté de négocier le tout pour le tout contre un deuxième pack de biscottes (malheureusement sans succès) puis me voila arrivé sur l'ordi pour narrer un peu cette journée si particulière.

Content d'avoir passé ce cap. Content de ne plus craindre de ce côté là pour l'avenir.

Il est 22h29. L'infirmière de nuit passe me dire bonsoir et me faire la piqure de cuisse, première de la série qui s'annonce. J'en profite pour me lever pour la première fois... et pour aller faire le pissou libérateur, annonciateur du renouveau.

Damn sexy je suis: pas coiffé, dans ma robe de nuit ouverte sur l'arrière, tout rouge écarlate sur mon ventre gonflé et trois fois pansementé.... n'empêche je prends conscience de la chance qui est la mienne: je suis soigné et me suis réveillé de mon "gros sommeil".

D'ailleurs, je voudrais pas donner une image de feignasse-paresseuse... mais tant pis pour les préjugés: il est sans doute l'heure de retourner dormir ;)